Burkina Faso : « Nous faisons semblant de ne pas voir », le cri d’alarme du Président Ibrahim Traoré qui doit réveiller l’Afrique.

Dans un discours percutant prononcé lors du deuxième sommet de la Confédération des États du Sahel (AES) à Bamako, le Président burkinabè Ibrahim Traoré a lancé une accusation lourde de sens et une mise en garde glaçante. Pointant du doigt « les impérialistes » qu’il accuse de vouloir mettre « l’Afrique de l’Ouest à feu et à sang », il a immédiatement retourné le miroir vers l’intérieur du continent. Sa déclaration choque par son franc-parler : « Mais du sommet de l’État jusqu’à certaines populations, soit nous faisons semblant de ne pas voir venir le danger, ou bien nous sommes nous-mêmes complices de ce qui va arriver ».

Cette assertion va bien au-delà de la rhétorique anti-impérialiste habituelle. Le capitaine Ibrahim Traoré introduit une notion de responsabilité endogène, de complicité par l’inaction ou la dénégation. Il soulève une question fondamentale et inconfortable : face aux manœuvres externes souvent dénoncées, quelle est la part de responsabilité des Africains eux-mêmes dans la perpétuation des crises qui les accablent ? Son propos ne se limite pas aux élites politiques ; il inclut « certaines populations », élargissant le champ de la réflexion critique à la société tout entière.

Cette interpellation force à une introspection collective salutaire. Faisons-nous vraiment « semblant de ne pas voir » ? L’habitude des conflits, la résignation face à l’ingérence, ou la tentation des gains individuels à court terme dans des schémas délétères nous rendent-ils passifs, voire acteurs d’un système qui nous nuit ? La dénonciation commode de l’extérieur peut parfois servir à occulter les faillites internes, les divisions ethniques ou religieuses instrumentalisées, la corruption qui sape la souveraineté réelle, et le silence assourdissant des citoyens devant les dérives.

Le Président Ibrahim Traoré, en parlant de « complices », touche à une vérité amère. Être complice, c’est ne pas résister activement, c’est accepter des narratives divisives, c’est troquer la dignité collective contre des avantages personnels ou communautaires immédiats. C’est aussi, pour certaines élites, fermer les yeux sur des agendas externes en échange d’un soutien politique ou militaire qui perpétue leur pouvoir au détriment de l’intérêt général.

 La prise de conscience qu’une partie du problème est en nous est la condition sine qua non pour bâtir des solutions durables et souveraines. Il ne s’agit plus seulement de désigner un ennemi extérieur, mais de s’interroger sur les failles internes que cet ennemi exploite.

L’avenir de l’Afrique de l’Ouest, secouée par l’instabilité, se joue peut-être dans cette capacité à regarder en face cette double réalité : la persistance de convoitises étrangères et nos propres fragilités. La réflexion que le Président Ibrahim Traoré exhorte à mener est urgente. Car, en définitive, le premier rempart contre le chaos n’est pas seulement une armée ou une alliance, mais un peuple conscient, uni et irréprochable dans sa volonté de se défendre et de se construire. Refuser d’être complice, c’est choisir d’être acteur de son propre destin.

Amen K.

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