Libye : Khalifa Haftar défie l’Union européenne pour s’imposer comme acteur incontournable

Le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’Est libyen, a envoyé un message politique fort à l’Union européenne : son camp ne se contentera plus d’un rôle secondaire sur la scène internationale. En refusant l’entrée à une délégation européenne à Benghazi le 8 juillet dernier, le chef de l’armée nationale libyenne a marqué une nouvelle étape dans sa stratégie de légitimation.

La délégation, composée de ministres grec, italien et maltais, ainsi que d’un commissaire européen, venait de rencontrer à Tripoli le gouvernement d’unité nationale (GNU) dirigé par Abdelhamid Dbeibah, reconnu par les Nations unies. À leur arrivée à l’aéroport de Benghazi, ils ont été refoulés par les autorités de l’Est, qui ont dénoncé une « violation des usages diplomatiques » et critiqué la reconnaissance exclusive du GNU par Bruxelles.

Pour de nombreux observateurs, cette réaction dépasse la simple provocation. Selon Tarek Megerisi, analyste au European Council on Foreign Relations (ECFR), cet incident vise à rappeler que l’Est libyen est un acteur avec lequel l’Europe doit compter, notamment sur le dossier sensible de la migration. Les départs de migrants vers la Crète ayant augmenté, Haftar entend utiliser cette réalité comme levier diplomatique.

Le chercheur Jalel Harchaoui y voit également une réponse ciblée à la Grèce, accusée d’avoir exigé des concessions de Benghazi sans proposer de contrepartie.

Dans ce contexte, la famille Haftar poursuit une stratégie d’expansion diplomatique active. Le maréchal a été reçu ces derniers mois par Emmanuel Macron et Vladimir Poutine, tandis que son fils, Saddam Haftar, multiplie les déplacements stratégiques en Turquie, Italie, États-Unis et Niger pour nouer des alliances économiques et sécuritaires.

Même Ankara, alliée de Tripoli durant la guerre civile, se montre aujourd’hui plus ouverte à un dialogue avec l’Est, dans un climat régional dominé par les enjeux énergétiques et les rivalités d’influence en Méditerranée. Cette montée en puissance diplomatique du camp de l’Est pourrait redéfinir les équilibres politiques en Libye et mettre Bruxelles face à la nécessité de réévaluer sa stratégie dans le pays.

Amen K.

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