Cameroun : Budget 2026, entre investissements d’avenir et urgences immédiates
Face à un contexte national et international complexe, le gouvernement camerounais a présenté son projet de budget pour l’exercice 2026. Ce document financier est plus qu’une simple prévision comptable ; il incarne une stratégie de navigation dans des eaux économiques tumultueuses, tentant de concilier des impératifs souvent contradictoires. Entre la nécessité d’investir pour l’émergence et l’obligation de répondre à des crises aiguës, les priorités budgétaires dessinent une feuille de route ambitieuse.
La priorité absolue demeure la sécurisation du territoire. Les conflits dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ainsi que la menace persistante de Boko Haram dans l’Extrême-Nord, imposent un niveau de dépenses militaires et sécuritaires extrêmement élevé. Pour 2026, une part substantielle du budget est une nouvelle fois dédiée à la défense, au renseignement et à la relance économique des zones en crise. Ce poste, quasi incompressible, limite drastiquement les marges de manœuvre pour d’autres secteurs et constitue un défi permanent pour l’équilibre des finances publiques.
Deuxième axe majeur, le soutien à une économie fragile. L’inflation importée, la volatilité des cours des matières premières et les goulots d’étranglement logistiques continuent de peser sur la croissance. Le budget 2026 mise sur des incitations fiscales pour le secteur privé, un soutien accru à l’agriculture vivrière et aux PME, et la poursuite de grands projets structurants comme le barrage de Nachtigal. Parallèlement, des mesures sociales ciblées (subventions, programmes d’emplois jeunes) visent à amortir le choc du coût de la vie et à préserver la stabilité sociale, dans un climat où les frustrations sont palpables.
Malgré les tensions, le gouvernement maintient son cap sur les investissements d’avenir. Les secteurs de l’éducation, de la formation professionnelle et de la santé reçoivent une attention particulière, avec l’objectif de bâtir un capital humain compétitif. La modernisation des infrastructures de transport (routes, ports, rail) reste également une priorité pour désenclaver l’arrière-pays et réduire les coûts de production. Cependant, le financement de ces projets ambitieux dans un contexte de dette publique élevée et de pression sur les dépenses courantes exige un recours prudent à l’emprunt et un appel renforcé aux partenariats public-privé.
Au-delà des allocations, le succès de ce budget reposera sur sa mise en œuvre transparente et efficace. Les Camerounais et les partenaires techniques attendent une gestion rigoureuse des fonds publics, une lutte tangible contre les fuites et la corruption, et des résultats mesurables sur le terrain. La capacité à exécuter les dépenses d’investissement prévues et à garantir que chaque franc dépensé serve réellement les priorités annoncées sera le véritable test de crédibilité pour les autorités en 2026.
En définitive, le budget camerounais pour 2026 est celui d’un pays en résilience, cherchant à poser les jalons d’un développement durable tout en combattant des feux multiples. Son équilibre précaire reflète les profonds défis de la période, où chaque décision de dépense est un arbitrage douloureux entre le présent urgent et l’avenir nécessaire.
Amen K.
