Gabon : Quelle peine pour Brice Laccruche Alihanga ?
C’est une nouvelle étape dans la descente aux enfers que Brice Laccruche Alihanga (BLA) a entamée voici deux ans, quasiment jour pour jour. Le 7 novembre 2019, le directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba, l’homme qui avait régenté Libreville alors que le chef de l’État était en convalescence, tombait de son piédestal : limogé de son poste, il était nommé à un fantoche ministère « chargé du suivi de la stratégie des investissements humains et des objectifs de développement durable ».
Dans le viseur des autorités, il avait vu l’étau se resserrer, à mesure que la confiance d’Ali Bongo Ondimba et de son fils Noureddin disparaissait. Le 3 décembre, il était arrêté, soupçonné, entre autres, de détournements de fonds publics et de blanchiment d’argent en relation avec le secteur pétrolier et la Gabon Oil Company. Le début de sa vie à l’isolement, au sein de la prison centrale de Libreville.
Multiples chefs d’accusation
Depuis, BLA – un acronyme qui faisait encore trembler Libreville voici trois ans – attend le verdict de la justice, tout en essayant d’obtenir une libération provisoire que différentes cours lui ont tour à tour refusée. Parfois découragé, il a tenté de se suicider le 21 mai 2020, après six mois de privation de liberté, s’entaillant les veines avec ce qu’il avait trouvé à portée de main. Néanmoins combattif, il a voulu mettre en place une stratégie de défense avec ses avocats gabonais Anges Kevin Nzigou et Jean-Paul Moubembé.
Présenté au procureur le 23 avril 2021, il lui avait été signifié un autre chef d’accusation : obtention de document administratif sur la base d’une fausse déclaration. Selon l’accusation, Brice Laccruche Alihanga se serait fait établir en 2004 un certificat de nationalité précisant qu’il était gabonais d’origine. Or BLA est né en France en 1980. Ses parents, Norbert Fargeon et Elizabeth Dupont, sont français. Et s’ils vivaient à Libreville depuis 1976, ils avaient préféré que leur enfant voie le jour à Marseille.
Des faits présumés de détournement toujours en instruction
Ce sont ces accusations d’obtention frauduleuse qui étaient examinées ce mardi 26 octobre par le tribunal correctionnel de Libreville. Devant la cour, Brice Laccruche Alihanga a reconnu les faits et le procureur a ensuite requis cinq ans de prison ferme et cinq millions de francs CFA d’amende, la peine maximale prévue par la législation gabonaise. Sa défense, qui a jusqu’au bout tenté de contester la compétence du tribunal mais a été déboutée par la Cour de cassation en septembre, espère obtenir la clémence du juge après avoir choisi de plaider coupable.
Le verdict dans ce volet de l’affaire BLA est attendu ce vendredi 29 octobre et pourrait ensuite donner lieu à un appel, selon la sévérité de la peine. Mais un autre épisode judiciaire pourrait surtout suivre ce premier acte, puisque les accusations de détournements de fonds publics et de blanchiment d’argent – émises depuis décembre 2019, dès l’arrestation de l’ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba – sont toujours en cours d’instruction.
« Le dossier est vide, même après deux ans d’enquête », déplore Me Anges Kevin Nzigou, contacté par Jeune Afrique. Selon nos informations, la dernière audition de Brice Laccruche Alihanga devant le juge d’instruction chargé de ce pan de l’enquête a eu lieu en mai dernier et les charges n’ont pas été abandonnées depuis. L’ancien administrateur-directeur général de Gabon Oil Company, Christian Patrichi Tanasa, ainsi que l’ex-collaborateur de BLA à la présidence, Ike Ngouoni Aila Oyouomi, sont également toujours en détention en lien avec ce dossier.
Jacques BONDIO